interviews

Entretien avec Verena Hirsch

Cheffe du service de Communication à l’OFS

Quelles sont les principales missions de l’OFS?
La complexité croissante du monde dans lequel nous vivons fait de l’information un élément incontournable dont on ne saurait se passer pour se tenir au courant, prendre des décisions et planifier des activités. L’information détermine la qualité de nos actions. En politique - que ce soit au sein des parlements, des gouvernements ou lors de votations et d’élections -, en économie ou dans notre vie quotidienne, l’information statistique occupe désormais une place importante. Elle contribue à la transparence dans les débats de société et les débats politiques.

A qui sont principalement destinés vos services?

Nous produisons des informations statistiques nécessaires au fonctionnement de la démocratie. Nos informations servent à la formation de l’opinion publique, à la prise de décisions politiques et à l’évaluation de l’action de l’Etat. Nous tenons compte dans nos travaux des domaines d’activité politique prioritaires et mettons en évidence les problématiques futures.
Par exemple pour les votations du 11 mars prochain concernant la durée des vacances nous avons publié des documents qui aideront les citoyens à se forger une opinion en tenant compte de la réalité des faits.

En 2010, vous avez fêté les 150 ans de l’OFS, quelles ont été les principales évolutions au niveau des méthodes statistiques, des sujets de recherche, des résultats et de la diffusion des résultats depuis la création de l’office?
Ce sont les autorités politiques (le Conseil fédéral et le Parlement) qui décident quels faits de société et quelles questions économiques ou environnementales doivent régulièrement faire l’objet de relevés avec les moyens limités de la statistique publique. Mais il appartient aux responsables de cette même statistique publique de décider en toute indépendance de quelle manière les données doivent être collectées, traitées et les informations statistiques diffusées pour rendre la réalité le plus fidèlement possible et non pour en donner une image déformée parce qu’influencée par les desiderata des uns ou des autres.

Ce qui, depuis 150 ans, a certainement modifié en profondeur la production de statistiques ainsi que sa diffusion, c’est l’importance toujours plus croissante de l’informatique. Autrefois, pour avoir accès à des données statistiques, il fallait se rendre dans une bibliothèque pour y consulter les annuaires ; aujourd’hui, grâce au Portail statistique de la Suisse, disponible sur le web, ces données sont à disposition de tous, en tout temps.

«Je ne crois aux statistiques que lorsque je les ai moi-même falsifiées», dixit Churchill, dans quelle mesure avait-il raison?

En temps que dirigeant politique, Churchill avait une vision utilitaire de la statistique qui lui permettait de mener ses projets à bien. Les statisticiens suisses ont adopté la Charte de la statistique publique suisse en 2002. Cette charte se base sur les Principes fondamentaux de la statistique publique ; promulguée en 1992 par la Commission économique pour l’Europe des Nations Unies pour guider la reconstruction des systèmes statistiques des pays de l’Est à la chute du Mur. Adoptée en 1994 par la Commission statistique des Nations Unies, cette charte est un code de conduite et un standard universel pour la profession. Ces principes servent à la fois de lien vital et de césure nette entre la statistique et la formulation de politiques. Ils garantissent une statistique publique au service du débat démocratique. Au niveau international, ils servent de référence de base pour la désignation de bonnes pratiques.

En se dotant d’un code de déontologie, les statisticiens affirment que leur activité constitue un service public indispensable qui répond aux exigences de notre société démocratique et à celles d’un Etat moderne. Ils mettent au centre de leurs préoccupations la pertinence, la qualité et l’indépendance des informations qu’ils produisent et diffusent.

Les statistiques sont souvent mal interprétées voire manipulées par les médias et les politiques, comment remédier à une telle instrumentalisation?

L’activité statistique publique bénéficie d’une indépendance scientifique, notamment vis-à-vis du pouvoir politique et de tout groupe d’intérêt. Les informations statistiques sont établies, présentées et commentées de manière impartiale, sans proposition ni recommandation de nature politique. L’interprétation des données faite par les médias et les politiques, et les décisions qui en découlent, ne sont pas du ressort de la statistique publique telle que la pratique l’OFS.